samedi 29 novembre 2008

Temps de chien

A la tombée de la nuit à Paris, un temps entre chien et loup.

Un vent d'automne chargé encore un peu des réminiscences de l'été, mais porteur de temps mauvais ; annonciateur en tourbillons persifleurs de relents sableux et de poussières de la ville ; laissant dans les yeux des larmes de crocodile amères et salées qui font ressembler les avenues bariolées des feux rouges de voitures à des rayures de zèbre.

Des ombres tourmentées des mille vies alambiquées de cette cité lunaire prend naissance et s'échappe un brouillard enveloppant et glacé, vaporisé de gouttelettes microscopiques et pétillantes. Les pavés en prennent, dans un reflet mouillé, la teinte luisante de clair obscur. Les grands arbres en ont l'écorce poisseuse et brunasse, laissant la main collante comme après une étreinte visqueuse. Les murs de calcaire transpirent de tous leurs pores de cette fièvre mauvaise.


Deux silhouettes qui s'avancent au coeur de l'hiver ; un homme et son chien. Fiers et beaux, maigres pareils, marchant d'une allure commune. Semblables aux dieux et aux aveugles ils en partagent le destin en une infirmité qui les transporte au delà de notre horizon commun, par delà la vie même. Au premier, une jambe raide qui infléchit sa route en un sens mystérieux. Au second, béquille au trottinement saccadé de valse rouillée, l'absence de patte arrière droite.
Deux vies tellement confondues de corps et de pensée qu'elles s'assemblent en une sculpture hybride, à la façon d'un centaure moderne.

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